
La très attendue première réunion du comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF), depuis la réélection du Sud-africain, le Dr Patrice Motsepe a validé la nomination des cinq vice-présidents de l’instance et les présidents des trois principales commissions statutaires. Coups fourrés et surprises-surprises. PAR NAZIM BESSOL
C’était la grande rentrée, hier à Accra, la capitale du Ghana en marge du Championnat d’Afrique scolaire U15, pour les nouveaux membres du comité exécutif de la CAF, élus le mois dernier au Caire (Égypte). La première réunion du second mandat du milliardaire sud- africain Patrice Motsepe à la tête de l’instance panafricaine, était très largement consacrée à la distribution des postes et des attributions. Le patron de la CAF, seul responsable et détenteur exclusif – selon les statuts de l’instance – du choix de nommer ses cinq vice-présidents, a opté pour la capitulation et l’application stricto sensu, des orientations ou conseils du président de la FIFA Gianni Infantino, quitte à enfreindre certains usages.
Un curieux précédent
Ainsi, Fawzi Lekjaa, président de la Fédération royale marocaine (FRMF) élu au conseil de la FIFA, le mois dernier avec 49 voix sur 54, a été nommé 1er vice-président. Il remplace le Sénégalais Augustin Senghor qui avait démissionné avec fracas après un cuisant échec à rejoindre le Conseil de la FIFA. Il s’agit là d’une première dans l’histoire moderne de la Confédération africaine de football (CAF). Les postes de vice-président ont toujours été réservés aux membres du Comex élus au niveau de la CAF et non de la FIFA. Une faveur donc, faite par Patrice Motsepe au seul président de la Fédération royale marocaine, qui avait occupé la 3e vice-présidence sous le règne du Malgache Ahmad Ahmad. Les autres membres africains du Conseil de la FIFA, Hany Abou Rida (Égypte), Djibrilla Hima Hamidou (Niger), Kanizat Ibrahim (Comores) ; Ahmed Yahya (Mauritanie), Hassan Souleymane Waberi (Djibouti), n’ont
pas bénéficié du même traitement de la part du président de la CAF.
Des vice-présidents juniors
Sur les six nouveaux entrants au Comité exécutif parmi lesquels le ministre des Sports et président de la Fédération algérienne de football (FAF), Walid Sadi, trois ont été élevés au statut de vice-président. La ministre déléguée près le ministre des Affaires étrangères de la RD Congo, Bestine Kazadi, en tant que 4e vice- présidente et le Mozambicain Feizal Sidat. Le Ghanéen Kurt Okraku dont le pays accueille le tournois U15 et la réunion du Comité exécutif a hérité de la 2e vice-présidence et le Gabonais Pierre-Alain Mounguengui a été choisi pour la 3e vice-présidence et président de la Commission d’organisation du Championnat d’Afrique des Nations (CHAN). Ce dernier, ardemment défendu par le secrétaire général de la CAF, Veron Mosengo Omba, auprès de ses autorités lorsqu’il avait été mis en prison (non-dénonciation de crimes de pédophilie), avait un certain temps été pressenti pour le poste de premier vice-président avant que les membres du Conseil de la FIFA ne réclament ces positions.
Le pouvoir aux membres du conseil de la FIFA
Une demande qui n’avait pour but au final que de porter Fawzi Lekjaa à cette position. En réclamant le titre de vice-président, Ahmed Yahia, Souleyman Waberi et Hani Abu Rida, tous élus grâce au soutien du Marocain ont mis sous pression le patron de la CAF, l’obligeant à négocier et à lâcher quelque chose. C’est ainsi qu’il a été contraint et forcé de céder sur la première vice- présidence et de créer un précédent. Il en fera de même pour ce qui est des commissions. Si le choix porté sur le président de la Fédération camerounaise de football semblait assez logique pour ce qui de la commission technique, l’attribution de la commission d’organisation de la CAN au Mauritanien Ahmed Yahia (président de la commission interclubs) semble obéir au même schéma que celui de la première vice-présidence. Il en sera de même pour la commission d’organisation du CHAN, attribuée au Djiboutien Souleymane Waberi.
La main de Gianni Infantino
Conscient de la frustration suscitée, et limite mal à l’aise, avec la liste présentée à ses membres, le président de la Confédération africaine de football n’a pas caché l’origine de cette liste et de ces nominations. Il l’a clairement affirmé et assumé devant les présents. « J’ai discuté avec le président de la FIFA, Gianni Infantino, qui m’a recommandé ou conseillé ces noms», a expliqué Patrice Motsepe durant la réunion, selon un membre présent contacté par Botola.Unefaçondetuerdansl’œuf touteéventuellecontestationoudébat sur la question. Une situation que déplore notre interlocuteur «il faut se rendre à l’évidence, nous ne sommes pas libres de nos faits et gestes, c’est triste mais c’est la dure réalité», déplore sous couvert d’anonymat notre interlocuteur.
L’équilibre zonal ignoré
En plus de l’emprise de la FIFA dénoncée souvent qu’en «off» par certains membres, ces derniers doivent faire face aux conséquences de ce contrôle. L’ajout de deux vice- présidents supplémentaires à partir de 2021 pour aboutir à cinq afin de contenter un maximum de personnes lors de la première élection (candidat unique) de Patrice Motsepe à la tête de l’instance, aurait dû contribuer à une meilleure représentativité zonale du continent au niveau de l’exécutif. Ainsi, plusieurs observateurs déplorent aujourd’hui à juste titre l’absence d’équilibre. A partir du moment où le président est issu d’une zone, les cinq vice-présidents devraient être choisis depuis les cinq autres zones. Or dans le choix opéré hier par Patrice Motsepe, la Congolaise Bestine Kazadi (3e VP) et le Gabonais Pierre -Alain Mounguengui (2e VP), appartiennent à la même zone (UNIFFAC). Le Mozambicain Feizal Ismael Sidat appartient pour sa part à la même zone (COSAFA) que celle du président Motsepe. Dans le même temps, ni l’UFOA ni la CECAFA ne sont représentées au niveau des vice- présidents.
Cooptation
Enfin, en marge de cette première réunion du comité exécutif pour la nouvelle mandature, deux nouveaux membres ont été cooptés par le président de la CAF au sein de son Comité exécutif de la CAF. L’Ethiopien Esayas Jira Bosho dont le pays a accueilli la dernière assemblée générale ordinaire de fin de mandat de Patrice Motsepe. Une réunion durant laquelle l’Éthiopie avait d’ailleurs annoncé par le biais de son Premier ministre sa candidature à l’organisation de la CAN-2029. Le second délégué coopté n’est autre que le président de la Fédération ivoirienne de football (FIF), Yacine Idriss Diallo. Ce dernier avait contribué à l’organisation de la CAN- 2023 dans son pays et remportée par les Éléphants de Côte d’Ivoire. Pas assez pour remporter un siège au Conseil de la FIFA, malgré le soutien affiché du président Alassane Ouattara, les moyens déployés. Son échec a été vécu comme un affront par les autorités ivoiriennes. Elles ont informé la CAF de leur incapacité d’organisation de la CAN U20 qui leur a été attribuée. Esayas Jira Bosho et Yacine Idriss Diallo sont cooptés pour une durée de deux ans, selon les termes de l’article 22, al 11 des statuts de la CAF.
– NAZIM BESSOL