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CAF : A Nouakchott, un pacte anti-Senghor?

NAZIM BESSOL

A deux semaines (12 mars 2025) de l’Assemblée générale élective de la Confédération africaine de football (CAF), la campagne bat son plein pour les élections au Conseil de la Fédération internationale de football. PAR NAZIM BESSOL

Le président sortant de la CAF, le Sud-africain le Dr Patrice Motsepe, candidat unique est assuré de garder son siège et son titre de vice-président de la Fifa. Treize candidatures (10 hommes et 3 femmes), pour cinq sièges dont un réservé au représentant féminin (voir liste) ont été validées par la commission de gouvernance de la Fifa. Contrairement aux années précédentes où il est question de respecter un certain équilibre régional avec un scrutin par zone géographique et linguistique, l’élection à venir risque de créer beaucoup de crispation. Une campagne a été lancée par Ahmed Yahia à Nouakchott en fin de semaine dernière en marge du lancement de l’Académie des talents de la Fifa et la modernisation du stade Cheikha-Ould -Boïdiya. Et plus d’une trentaine de présidents de fédération étaient conviés et une feuille de route pour le prochain scrutin a été établie.

Tapis rouge
La suppression du découpage linguistique pour les membres africains au Conseil de la Fifa rend le scrutin très incertain, même si les grandes orientations de « la maison mère », la Fifa, ne devraient pas être chamboulées. Entre retrait de dernière minute, alliance de circonstance et instructions des autorités de certains pays, la composante africaine du Conseil de la Fifa ne devrait pas connaître de grande surprise. Au rayon des favoris, on retrouve le « dinosaure » Hani Abu Rida (Égypte) qui a bénéficié de la levée de la limite d’âge lors de la 46e assemblée générale ordinaire à Addis-Abeba, au mois d’octobre dernier. Un changement qui lui a permis de récupérer la fédération égyptienne de foot- ball, cinq ans après son éviction en 2019. La tenue de l’assemblée élective chez lui au Caire, devrait aussi lui permettre de dormir plus tranquille et de maîtriser « la logistique ». A ses côtés, son complice et ami Fawzi Lekjaa ne devrait non plus être inquiété, il a une bonne partie ,et maîtrise d’une main de fer, de l’assemblée générale de la CAF et de l’actuel Exco. Ministre du Budget, il dépense sans compter et surfe sur la co-organisation de la Coupe du Monde- 2030.

Ahmed Yahia en pole position
Le troisième siège devrait selon nos informations revenir au Mauritanien Ahmed Yahia. Fidèle parmi les fidèles du grand patron Gianni Infantino, Ahmed Yahia, candidat à la présidence de l’instance en 2021 fait partie du premier cercle. Il a connu une ascension fulgurante jusqu’à devenir le 2e vice-président de la CAF, sans jamais avoir remporté le moindre scrutin. Un parcours qui n’enlève rien aux multiples réalisations et réformes imprimées au football mauritanien plus visible à l’échelle internationale et continentale (sélection et clubs), depuis son arrivée à la tête de la Fédération mauritanienne de football à l’âge de 31 ans en 2011. Ainsi, trois candidatures assurées de siéger au Conseil de la Fifa lors des quatre prochaines années. Deux d’entre elle sont issues de la zone nord (Unaf) et une de la zone UFOA A. Mais pour de nombreux délégués croisés à Addis-Abeba au mois d’octobre dernier, il s’agit de trois arabes, ce qui est beaucoup à leurs yeux. Ils acceptent mal de voir trois, même quatre -si la Comorienne Kanizat Ibrahim est élue- sièges sur cinq, revenir aux arabes, alors qu’ils sont les moins nombreux au niveau de l’assemblée générale de la CAF.

Senghor joue gros
Si les trois noms cités plus haut sont quasi assurés de passer les quatre prochaines années entre le Caire et Zurich, d’autres jouent gros et devront batailler ferme. Il s’agit en premier lieu du président de la Fédération sénégalaise de football (FSF) et 1er vice-président de la CAF, Me Augustin Senghor. Le président le plus titré du continent, celui qui a donné leurs lettres de noblesse aux Lions de la Teranga de l’équipe première championne d’Afrique en 2021 et finaliste en 2019 à celle du Beach soccer, les U17, U20, jusqu’à la sélection des locaux, Senghor a mis en place une véritable organisation à truster les titres. Mais ce statut ne le met pas à l’abri des surprises. S’il a accepté en 2021 de retirer sa « très gênante », voire dangereuse candidature pour le schéma mis en place à Rabat, ce n’est que sur intervention des plus hautes autorités de son pays contre le titre de 1er vice-président. Un vécu et un titre de premier vice-président de l’instance continentale qui devraient légitimement lui ouvrir les portes du Conseil de la Fifa. Mais les échos de Nouakchott où Ahmed Yahia avait réuni en fin de semaine dernière pas moins de 32 présidents de fédération et scellé un pacte comme cela avait été le cas en 2021, sont défavorables au Sénégalais.

Il fait de l’ombre à Fawzi Lekjaa
Le maire de l’Ile de Goré pourrait faire les frais d’alliances et de manœuvres faites pour le laisser sur le carreau. Malgré le réchauffement des relations avec le patron de la Fifa, Gianni Infantino, depuis 2021, la pré-sence d’Augustin Senghor au Conseil de la Fifa pourrait faire de l’ombre à Fawzi Lekjaa. Ce dernier ne lui a jamais pardonné son soutien affiché et assumé au retour de l’Algérie au Comité exécutif de la CAF. Il lui préfère le novice, l’Ivoirien Yacine Idriss Diallo qu’il soutient pour intégrer l’exécutif de la Fifa sans jamais avoir siégé à l’Exco de la CAF. Une coalition qui oblige Augustin Senghor, l’un des plus illustres dirigeants du football africain à mouiller le maillot, sans plus de garantie que les traditionnelles accolades et formules de soutien. S’il est évident que le football africain a besoin de dirigeants de la trempe de Senghor, un échec à la course au Conseil éliminerait du centre de décision et remettrait en cause son avenir chez lui au Sénégal.

Kanizat Ibrahim, le vent en poupe                                                                                                                                    A en croire les informations en provenance de Mauritanie et d’ailleurs, le pacte de Nouakchott aurait déjà verrouillé les quatre places au Conseil en plus de celle du Président Patrice Motsepe. Celle du membre féminin devrait revenir à la Comorienne Kanizat Ibrahim qui a le vent en poupe et qui vient de clore son premier mandat à l’exécutif de la CAF après avoir dirigé le bureau de normalisation chez elle en 2019. En face, la candidate sortante Isha Johansen ne fait plus l’unanimité, tout comme l’ancienne membre du conseil de la Fifa Lydia Nsekera qui tente depuis deux mandats un retour désespéré. Seul le sixième et dernier siège devrait connaître une lutte acharnée entre le reste des candidats (Souleiman Hassan Waberi, Mathurin De Chacus, Djibrilla Hima Hamidou et Amaju Melvin Pinnick et Andrew Ndanga Kamanga).

Un siège pour neuf
Si le pacte est respecté à la lettre, l’Afrique de l’Ouest sur-représentée ne devrait pas parvenir à propulser l’un des siens d’autant que la multiplication des candidatures d’une même zone dispersait mécaniquement les
voix. L’absence dans le pacte tel qu’il a été établi d’un candidat anglophone bien que le découpage linguistique eut été aboli, constituerait une anomalie supplémentaire et porterait un sérieux coup à la représentativité du continent. C’est sous cet angle que les candidatures de Amaju Melvin Pinnick et Andrew Ndanga Kamanga tous deux anglophones trouvent leur force, même si le premier n’a plus aucune fonction officielle dans le football nigérian depuis l’élimination des Super Eagles de la course au mondial de 2022. Le Zambien pourrait bien avoir une carte à jouer d’autant qu’il est issu d’une zone qui compte 14 voix.

Deux zones avec 25 voix                                                                                                                                           Ndanga Kamanga tout comme le Djiboutien Souleiman Hassan Waberi, pourrait avoir une bonne carte à jouer pour tirer l’un ou l’autre la dernière carte pour Zurich. Ils sont tous les deux soutenus par leur zone respective COSAFA et CECAFA, lesquelles zones avaient annoncé dans un communiqué début février qu’elles soutiendraient « mutuellement le candidat unique de chaque zone pour un siège au sein du Conseil de la Fifa». Le vote des deux zones représente 25 voix ! Mais d’ici au 12 mars prochain, date du scrutin, beaucoup de choses peuvent encore bouger, tout particulièrement la veille du vote !
– NAZIM BESSOL

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