
A quelques jours de la 45e assemblée générale ordinaire de la Confédération africaine de football (CAF) et le renouvellement partiel de son comité exécutif, l’instance panafricaine a rendu publique la liste des candidatures validées
Onze présidents d’associations représentant les six zones de la CAF se disputent six sièges. Deux d’entre eux sont assurés de siéger pour un nouveau mandat à l’exécutif de la CAF, le 1er vice- président de l’instance le Sénégalais Augustin Senghor et le Gabonais Pierre-Alain Mounguengui, candidat unique de la zone Afrique de l’Ouest A (UFOA A) pour le premier et l’Afrique centrale (UNIFFAC) pour le second. Pour la zone Nord, les candidatures du président de la Fédération algérienne de football (FAF) Djahid Zefizef et celle du Libyen Abdulhakm Alshelmani, membre sortant du comité exécutif, président de la fédération Libyenne de football (FLF) et de l’Union Nord africaine de football (UNAF) ont aussi été validées.
Une commission de gouvernance virtuelle
La commission de gouvernance n’a pas jugé utile de s’attarder ni d’approfondir les investigations concernant le candidat libyen. Comme annoncé dans notre précédente édition (02 juillet 2023), la dernière élection d’Abdulhakim Alshelmani comme président de la Fédération libyenne de football (FLF) a fait l’objet d’un recours et d’une action en justice. Selon les documents que Botola a reçus, Ibrahim Othman candidat à la présidence de la FLF et trois clubs (Tobrouk, Misratat et Benghaz), ont saisi les juridictions locales et même le TAS de Lausanne pour invalider l’élection du 21 janvier 2021.
Des intrus à l’AG Ibrahim
Othmani qui n’a pu se porter candidat a demandé l’annulation des travaux de l’assemblée élective « en faisant valoir que 3 personnes n’avaient pas la qualité pour représenter leur club (et donc voter), que la liste définitive des candidats était incomplète, que la Commission électorale avait demandé aux votants de prendre en photo leur bulletin de vote et qu’il lui avait été interdit de participer à la réunion de la Commission électorale alors que d’autres candidats étaient présents », écrit le TAS dans son rappel des faits. Selon Othmani ,l’article 21 des statuts de la FLF exige que le vote soit fait par le président ou vice-président d’un club, or au moins quatre clubs ont fait voter d’autres personnes qui n’avaient pas cette qualité.
La Commission d’appel absente
Il en est de même pour l’assemblée générale de la FLF qui n’a pas élu de commission d’appel électorale conformément à l’article 22 alinéa 3 des statuts de la FLF. Un manquement qui prive les candidats du droit de faire appel. Un manquement que le président Abdulhakim Alshelmani ne conteste nullement puisque le TAS écrit que ce dernier rappelle que l’article 22 des statuts de la FLF désigne la seule commission de recours comme seul organe compétant pour traiter un tel cas mais cette commission « n’existe pas » tout comme « l’Intimé n’a en effet pas prouvé son existence en produisant par exemple le procès-verbal de l’assemblée générale qui nomme les membres de cette commission d’appel électorale»,rappelle l’instance arbitrale !
La police en soutien
Et ce n’est pas tout puisqu’en matière de piètement des règles et des statuts de la FLF, le président sortant n’y est pas allé avec le dos de la cuillère. Selon son adversaire, même le choix des vérificateurs de vote (Art22, Al 5) n’a pas été fait dans les normes. Ces derniers qui sont chargés de vérifier la régularité de la composition des bureaux de vote et des opérations de vote étaient tout simplement absents et remplacés par « un corps étranger au mouvement sportif, la police » ,ce qui a permis d’interdire aux soutiens de la liste opposée au président sortant d’accéder au bureau de vote par intimidation physique et verbale. Une vidéo a d’ailleurs été fournie au dossier transmis au TAS. Selon les constatations de Aïd Idriss Abdelwaniss, observateur mandaté par le Comité olympique libyen, l’ensemble des vérificateurs « étaient tous de la même région que le président sortant et ils ont participé à perturber le vote.
La politique du fait accompli
Face à tant de griefs pour la plupart documentés et qui ont fait l’objet d’une procédure judiciaire en Libye ,la seule réponse ou défense d’Abdulhakim Alshelmani a consisté à rappeler l’interdiction faite aux membres de recourir aux juridictions civiles et de contester la compétence du Tribunal arbitral du sport de Lausanne. Comme rapporté dans les conclusions de ce dernier « Le 16 juin 2021, l’intimé [ d’Abdulhakim Alshelmani ,NDLR] a informé le greffe du TAS qu’elle contestait la compétence du TAS dans cette affaire, en l’absence d’une clause arbitrale en faveur du TAS et dans la mesure où les appelants n’avaient pas épuisé les voies de recours interne. Elle demandait ainsi la clôture de la procédure ». Une défense face à laquelle ses opposants invoquent la politique du fait accompli et n’ont d’autre choix que de saisir le TAS compte tenu de l’interdiction dans les statuts de la FLF de tout recours aux instances judiciaires de droit commun.
Le no man’s land d’Alshelmani
En somme, Abdulhakim Alshelmani a volontairement ou pas créé un no man’s land réglementaire dans lequel il évolue comme le seul maître, niant le droit aux membres toute voie de recours ou de contestation de son pouvoir absolu. Il semble bénéficier de soutien et de relais de poids notamment au sein de la CAF, bien que son maintien à la tête de la Fédération libyenne de football et la validation de sa candidature au comité exécutif de la CAF par la commission de gouvernance, celle-là même qui doit faire face à ce genre de comportement, est une approbation au plus haut niveau du gouvernement sportif continental et international de telles pratiques.